La BCE peut racheter jusqu’à 3000 Mds de dette publique !

draghi bce euro

Il est nécessaire de réformer les statuts de la BCE afin de lui permettre un rachat massif des dettes publiques.  Certains évoquent les risques inflationnistes supposés d'une monétisation des dettes souveraines. Il n'en est rien.

Les risques de spirales inflationnistes sont en réalité quasi nuls aujourd’hui. C’est ce qu’affirme une récente étude menée par la banque Citigroup et reprise dans un rapport 2011 du Cepremap sur les banques centrales[1]. La capacité d’absorption de la BCE sans création monétaire (donc sans risque inflationniste) serait de 3000 milliards d’euros, à supposer que le système des banques centrales décide de se recapitaliser en conservant ses profits (un retour au financement public de la dette donc, mais dans un cadre européen). Au contraire, un peu d’inflation serait bénéfique. Cet avis est partagé par Paul Krugman ou encore par le chef économiste du FMI, le français Olivier Blanchard, qui écrivait déjà en 2010 que les objectifs d’inflation devraient être plus proche de 4% que de 2%.

Concrètement, cela signifie que la BCE pourrait racheter jusqu’à 3000 milliards d’euros sans créer d’inflation (soit la totalité de la dette italienne, espagnole et grecque). Une dépréciation d’actif supérieur au capital s’appelle en générale une « faillite ». Or, pour une banque centrale, on parle de « banque centrale qui opère à capital négatif ». De nombreuses banques centrales fonctionnent ou on fonctionné avec un capital négatif : par exemple au Chili, en Israël ou en République Tchèque. Cela suppose un bilan négatif de la BCE le temps que les intérêts (à taux faibles) et le principal soient remboursés par les Etats emprunteurs.

Autre preuve de l’absence de pressions inflationnistes : malgré le triplement de la taille du bilan de la BCE (passé de 12.5% du PIB européen en janvier 2007 à plus de 30% fin 2012), les anticipations d’inflation à moyen terme (entre 5 et 10 ans) restent en Europe à un niveau proche de 2%, avec une tendance à la baisse. Le risque est déflationniste aujourd’hui : l’endettement privé pousse à la contraction de la demande privée (investissement et consommation) et la demande publique se contracte aussi sous l’effet de l’austérité. Aux Etats-Unis, la Fed s’est engagée depuis septembre 2012 (sous les conseils de Michael Woodford) à poursuivre une politique de rachat de bons du trésor offensive : 45 milliards de dollars par mois pour une durée illimitée (programme QE3). Là encore, les anticipations d’inflation ne montrent aucun signe d’emballement, les capacités de production des Etats Unis étant encore loin d’avoir retrouvé leur niveau d’avant la crise.

Sandro Poli, co-responsable de la Commission économie du Parti de Gauche.

[1] Rapport écrit par Xavier Ragot, économiste et chercheur spécialiste des questions macroéconomiques et monétaires, aujourd’hui conseiller économique de Montebourg.

Pour aller plus loin :

  • Xavier RAGOTLes banques centrales dans la tempête (2012). Spécialiste des questions de macroéconomie monétaire. Il fait un bilan très critique de l’intervention de la BCE depuis le début de la crise. Aujourd’hui conseiller économique de Montebourg.
  • Micheal WOODFORDMethods of Policy Accommodation at the Interest-Rate Lower Bound, (2012 Jackson Hole Paper). Spécialiste reconnu des questions financières et monétaires, professeur à l’Université Columbia de New York. Il a beaucoup influencé le retour de la part des banques centrales (en particulier de la Fed) à des politiques monétaire dites « non conventionnelles » (rachat massif d’obligations d’Etat, rachat d’autres titres comme les crédits immobiliers, changement du niveau d’inflation d’ équilibre à travers un engagement de rachat illimité et transparent, etc…).

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.

*