Sortir du Traité de Lisbonne
Guillaume Etievant, Julie Del Papa
Pour un autre euro, sortir du Traité de Lisbonne !
Depuis la crise économique et financière démarrée fin 2008, la question de la sortie de l’euro se fait de plus en plus présente au sein du débat politique et médiatique. Seules deux alternatives semblent émerger : rester dans l’euro et continuer à subir le néolibéralisme et ses désastres ou sortir de l’euro pour pouvoir y résister. Le Parti de Gauche, fidèle à son habitude, a choisi de suivre une autre voie, moins évidente a priori, mais beaucoup plus efficace économiquement et politiquement : rester dans l’euro tout en récupérant sa souveraineté monétaire en désobéissant aux traités européens.
La monnaie unique, bouc émissaire du libéralisme
Soyons clairs : les critiques contre l’euro sont tout à fait fondées et il faut impérativement changer de politique monétaire. Ses conséquences désastreuses sont innombrables : surévaluation qui pénalise nos exportations, taux d’intérêt trop élevés qui freinent la croissance et l’emploi… Et surtout, le Traité de Maastricht de 1992 avait pour principal objectif d’interdire toute possibilité monétaire de combattre le libéralisme ou de limiter ses dégâts. Mais il faut rappeler que la « loi Rothschild » du 3 janvier 1973 interdisait déjà à la Banque de France de faire crédit à l’État à taux zéro, condamnant ainsi la France à s’endetter auprès des banques privées et à payer des intérêts très élevés. Notre pays n’a donc pas attendu l’euro pour se vendre à la finance et aux banquiers. Le Traité de Maastricht a entériné au niveau européen des orientations déjà imposées dans l’hexagone. Le problème n’est donc pas le fait d’avoir une monnaie unique mais plutôt les capitaux qui circulent à l’échelle planétaire sans contrainte, la soumission aux banquiers, les politiques ultralibérales de l’ensemble des gouvernements européens, l’absence d’harmonisation fiscale… D’ailleurs, le maintien d’une monnaie nationale au Royaume-Uni ne lui a pas du tout permis d’échapper à la crise. Bref, les problèmes d’aujourd’hui ne sont pas imputables à la monnaie unique mais à l’orientation idéologique des gouvernements nationaux et des traités. Sortir de l’euro n’est donc pas une solution.
Le FN veut sortir de l’euro pas du libéralisme
C’est d’ailleurs le tour de passe-passe du Front National. Logique : ce parti refuse de s’attaquer réellement aux privilèges du patronat et au libéralisme. La sortie de l’euro est donc un écran de fumée pour faire croire quand même aux classes populaires qu’il défend leurs intérêts. La stratégie monétaire choisie par Marine Le Pen déboucherait sur une concurrence accrue entre pays, via les dévaluations compétitives en chaîne des monnaies sorties de la zone euro. Cette guerre économique entre les pays ferait la joie du patronat car il se substituerait au rapport de force entre classes sociales. Même « nationale » le franc FN resterait un instrument au service du capital. Son programme de sortie de l’euro en douze points le prouve : la Banque de France resterait indépendante de l’Etat et il n’y aurait pas de contrôle des taux de change sur le long terme. La France serait donc la proie des spéculateurs, alors que l’euro a permis la disparition des taux de change intra-zone euro, ce qui a supprimé la spéculation sur les changes qui constituait le principal instrument de pression des marchés financiers sur les gouvernements. La proposition du FN est donc à l’image de ce parti : incohérente et entièrement tournée contre le peuple. A l’exact opposé, le Parti de Gauche considère qu’il est urgent de mettre la monnaie au service de l’intérêt général.
Rompre avec le Traité de Lisbonne
Il est nécessaire de sortir du Traité de Lisbonne pour mettre fin à la dictature de la finance. Ce traité, qui prétend nous interdire de contrôler la politique monétaire, nous refuse toute entrave à la circulation des marchandises et des capitaux et impose la libéralisation des services publics. C’est donc pour mener une politique conforme à l’intérêt général des Français que le Parti de Gauche propose de pratiquer la désobéissance européenne. A travers un référendum, les Français adopteront une liste de dispositions européennes auxquelles nous dérogerons par un choix libre et souverain. Ne l’oublions pas, le 29 mai 2005, le peuple français rejetait le projet de Constitution européenne. Cependant, les dirigeants politiques européens et français – la droite mais hélas aussi les députés du PS – ont piétiné la volonté du peuple et adopté un remake de la Constitution européenne, le Traité de Lisbonne. Ils ont refusé de respecter le vote des citoyens, au motif que le « non » provoquerait une crise en Europe.
Transformer l’Union européenne
Le PG étant un parti internationaliste, il entend œuvrer à une transformation radicale de l’Union européenne, non à sa destruction. L’échec des politiques de relance par la demande initiées en 1981 était dû à l’isolement de la France. L’union économique des pays européens est donc indispensable pour mener de véritables réformes sociales comme le salaire minimum européen. Il ne faut pas voir disparaitre les acquis de la construction européenne. Nous devons engager une épreuve de force au sein de l’Union européenne en démontrant qu’un gouvernement déterminé à le faire peut mener une autre politique, en sortant de l’application du Traité de Lisbonne. Tous les cataclysmes associés à ce que l’on appelle la « crise de l’euro » peuvent être combattus en invoquant le compromis du Luxembourg. Nous pourrions ainsi obtenir une clause d’exception en utilisant pour motif la violation de la volonté exprimée par le suffrage universel, qui constitue une atteinte grave aux intérêts supérieurs de la nation française.
Gagner le rapport de force
Pour mener le rapport de force à Bruxelles, nous mènerons librement les politiques conformes à l’intérêt général : création d’un pôle public bancaire, renationalisation du financement de la dette publique, élimination d’une part du stock de dette publique, politique sélective du crédit… Notre désobéissance sauvera l’économie française et fera tache d’huile dans toute la zone euro. Nul doute que les petits pays dévastés par les plans de rigueur (Grèce, Portugal, Espagne…) soutiendront la France dans sa désobéissance. Et l’Allemagne a plus à perdre que nous à une sortie de l’euro : elle sera donc poussée à accepter de modifier les statuts de la BCE pour que la zone euro n’éclate pas. A terme, le but est de briser le bloc libéral au sein de l’UE et de pousser à la négociation d’un nouveau traité. Il faut sortir du pessimisme et de la soumission à la technocratie européenne. La France, en tant que pays fondateur de l’Union européenne, a les capacités de la transformer. Sa glorieuse histoire le prouve. Il suffit pour cela d’un peu de courage politique.
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