Un flou significatif sur l’avenir des Partenariats Public-Privé

Chantier PPPAprès les dernières directives communautaires en date concernant les marchés publics, en place depuis le 26 février 2014, les transpositions en droit interne sont en cours. En effet, Bercy a annoncé son agenda déjà depuis le mois de mars 2014. De nombreuses perspectives sont ainsi ouvertes et notamment celle de l’harmonisation des outils contractuels publics.

Cette question représente un véritable serpent de mer du paysage contractuel public, voulu par les acteurs et les professionnels de la commande publique. La France dispose d’un arsenal juridique et d’outils contractuels dans le domaine public plus que conséquent, contribuant ainsi à une complexité certaine, puisque disposant chacun de règles propres les régissant (contrats de marchés publics, délégations de service public (DSP) qui se décomposent en concessions de service public, ou en régie intéressé, ou en affermage, contrats de partenariat qui se décomposent en Partenariat Public-Privé (PPP), ou en bail emphythéotique administratif (BEA), ou en autorisation d’occupation temporaire (AOT)…)

Suivant cette volonté d’harmoniser ces outils contractuels, notamment avec la création d’un code de la commande publique, Bercy annonce la refonte du PPP. Ce contrat consiste globalement à ce qu’un opérateur privé soit chargé par  une personne publique,  de toutes les phases nécessaires au montage d’un projet (conception, réalisation, montage financier) et à son exploitation, et  relevant de sa compétence (enceinte sportive, réseau d’éclairage, voirie…), pour une durée moyenne de 30 ans.

Cette refonte consisterait à assouplir le régime, déjà dérogatoire, de cet instrument. En effet, c’est un contrat qui n’a vocation qu’à être mis en place uniquement pour des opérations urgentes et d’une complexité certaine. Or, face au recul progressif et continu des investissement publics, et notamment des engagements de l’Etat, les personnes publiques ont de plus en plus tendance à utiliser cet outil à mauvais escient. Sans disposer d’une technicité et d’un retour suffisant sur les tenants et les aboutissants du contrat de partenariat, beaucoup de personnes publiques ont, en effet, considéré qu’il s’agissait d’une aubaine, n’ayant plus à assurer l’investissement complet et dès le lancement du projet, contrairement à ce qu’impose un marché public.

Or, seul le critère de l’urgence perdurerait. Le risque est très certainement celui de voir son recours facilité et accru; l’urgence pouvant très facilement être justifiée.

Mais cette harmonisation est assez déconcertante pour plusieurs raisons. Il s’agit tout d’abord d’un constat d’échec de la politique d’austérité mise en place. Il s’agira pour les personnes publiques de leur faciliter les démarches de recherche de pouvoir d’investissement pour l’accomplissement de leur mission, en omettant de dévoiler qu’à long terme, il s’agit d’endettement, de perte financière et donc de répercutions sur la société civile et les citoyens.

Ensuite, nous pouvons nous interroger sur le raisonnement mené par Bercy, alors que le PPP est très controversé actuellement, que ce soit par le pouvoir législatif, mais également par le pouvoir judiciaire.

Ces controverses datant de juillet 2014 ont certainement conduit les Députés à vouloir reprendre la main sur ce dossier, le gouvernement annoncé le désir d’utiliser la procédure d’urgence pour cette transposition, en utilisant la voie de l’ordonnance. En effet, par le biais d’un amendement au projet de loi de programmation des finances publiques, l’Assemblée Nationale a adopté la mise en place d’un encadrement un peu plus prononcé pour justifier le recours au PPP; ce qui peut laisse planer un doute sur l’avenir de ce contrat. Cela est d’autant plus justifié suite aux récentes critiques de la Cour Régionale des Comptes d’Ile de France reposant sur le surcoût engendré par la mise en place d’un contrat de partenariat en lieu et place d’un contrat de maitrise d’ouvrage public classique de type marché public, et de la difficile justification du caractère complexe de certaines opérations.

Emmanuel E.

Références :

– Directives 2014/24/UE et 2014/25/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 février 2014

www.economie.gouv.fr, Commande publique : Pierre Moscovici donne le coup d’envoi à la transposition des nouvelles directives européennes, 12 mars 2014

– Bénédicte Rallu, Le Moniteur, Transpositions des directives : en 2015 les PPP seront des marchés publics, 20 octobre 2014

– Jean-Pierre Sueur et Hugues Portelli, rapport d’information de la commission des lois du Sénat sur les partenariats publics-privés, les contrats de partenariats : des bombes à retardement?, n°733, 16 juillet 2014

– Conseil d’Etat, 30 juillet 2014, n°363007

– Article 29 bis projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019, octobre 2014

– Chambre Régionale des Compte d’Ile de France, rapport d’observations définitives, Commande publique et contrat de partenariat du collège Georges Pompidou à Courbevoie, 28 mai 2014

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