Nous, économistes, soutenons Mélenchon

PLACE AU PEUPLE ! 2012

Tribune de 50 économistes, issus notamment des universités Bordeaux-IV, université populaire de Caen, Lille-I, Paris-XIII, Paris-I, Toulouse I et Toulouse II, École d’économie de Paris et IEP Paris. 

PLACE AU PEUPLE 20 AVRIL 2012

Ce texte n’engage que ses signataires et non les institutions mentionnées.

Le programme du Front de gauche est parfois caricaturé comme un catalogue de mesures sociales irréalistes. Il est plutôt irréaliste de continuer dans la spirale austérité-récession qui plonge l’Europe vers le chaos et le chômage. Ce programme recèle une vraie cohérence et cela sur deux plans. D’une part, il se donne les moyens d’atteindre ses objectifs sociaux contre la domination des marchés. Le Smic à 1 700 euros brut, la hausse des minima sociaux, la retraite à 60 ans à taux plein, le développement des services publics ne répondent pas qu’à des urgences sociales. Ces mesures créeront l’impulsion pour sortir de l’austérité budgétaire et salariale. Elles sauveront les PME asphyxiées par la stagnation de la demande intérieure, la domination des grands groupes et la limitation du crédit. Elles permettront de planifier démocratiquement la transition sociale et écologique.

D’autre part, autre originalité de cette politique, elle engagera une véritable bifurcation de l’économie vers un modèle de développement de qualité. Ainsi, la réduction collective du temps de travail accroîtra les marges de manœuvre pour créer des centaines de milliers d’emplois, rompre avec la précarité, réduire les inégalités, notamment entre hommes et femmes, et ouvrir une autre conception du bien-être. La bifurcation de l’économie passe par des investissements d’avenir, méprisés par les marchés. Le Front de gauche propose donc de réorienter le crédit bancaire vers les projets porteurs d’un développement écologique de l’emploi, de la formation et de la recherche. Nous nous appuierons sur un pôle financier public qui associera en réseau les institutions financières publiques existantes, celles qui devront être socialisées, et les réseaux mutualistes.

L’un des leviers le plus puissant pour agir dans ce sens sera une redéfinition radicale du statut, des missions et des objectifs de la BCE. Les États sont obligés d’emprunter sur les marchés, ce qui augmente considérablement le coût de la dette. C’est le résultat d’une politique délibérée des gouvernements et des institutions européennes qui se sont volontairement placés sous l’emprise des marchés. Aucune politique progressiste ne sera possible si les marchés continuent à dicter leur loi. C’est pourquoi la BCE et les banques centrales nationales doivent pouvoir, sous contrôle démocratique, financer les déficits publics et racheter les titres publics sur le marché secondaire. Sans attendre la modification des traités qu’il faudra entreprendre, des marges d’action, au niveau national comme au niveau européen, peuvent déjà être mobilisées. Les 1 000 milliards d’euros que la BCE vient de prêter aux banques privées sans contrepartie sont là pour démontrer l’ampleur de ce qu’il est possible de faire si nous reprenons le pouvoir face à la finance. Un Fonds européen de développement solidaire financé en partie par la BCE et par une taxe sur les transactions financières permettra, avec la mobilisation de l’épargne populaire, de disposer des investissements publics nécessaires à la grande bifurcation de notre modèle économique. Par ailleurs, le Front de gauche mettra en place un audit citoyen de la dette qui déterminera les conditions de son remboursement.

Cette logique économique nouvelle s’appuiera sur une batterie de mesures fiscales (revenu maximum, progressivité de l’impôt sur le revenu, suppression de niches fiscales) et réglementaires (taxation des mouvements de capitaux, séparation des banques de dépôt et d’investissement, suppression des stock-options, interdiction des produits spéculatifs). Elle sera fondée sur l’exercice de nouveaux pouvoirs économiques des salariés dans l’entreprise, l’un des piliers de la VIe République sociale que nous proposons (droit de veto suspensif et de contre-propositions sur les plans de licenciements).

Cette logique peut s’appuyer sur de grandes forces sociales en Europe pour réorienter les politiques économiques et changer le cours de la mondialisation en nouant des coopérations avec les peuples des pays émergents et en développement. On nous menace d’un déchaînement des marchés financiers au lendemain des élections. Ayant seul pris la mesure de cette menace, le Front de gauche propose une nouvelle cohérence économique, sociale et écologique, appuyée sur des mesures précises pour gouverner face aux banques et reprendre le pouvoir aux marchés financiers, produire autrement, partager les richesses et abolir l’insécurité sociale.

35 premiers signataires : Louis Adam, commissaire aux comptes, Pierre Alary, maître de conférence Université Lille 1, Bruno Amable, professeur Université Paris 1, Philippe Batifoulier, Université Paris-Ouest, Nicolas Beniès, université populaire de Caen, Éric Berr, maître de conférence Université Bordeaux 4, Christian Berthier, économiste, Pierre Bezbakh, économiste et maitre de conférence à l’Université de Paris IX-Dauphine, Frédéric Boccara, économiste, Paul Boccara, université de Picardie,Marc Bousseyrol, maître de conférence IEP de Paris, Anne Briand, économiste, Université de Rouen,Mireille Bruyère, maître de conférence Toulouse 2, Laurent Cordonnier, maître de conférence Lille-1,Gérard Coutureau, maitre de conférences à l’Enfa de Toulouse, Yves Dimicoli, économiste, Jean-Paul Domin, maitre de conférences Université de Reims Champagne-Ardenne, Denis Durand, membre du Conseil économique et social, Cédric Durand, maître de conférence Université Paris 13, Guillaume Etievant, expert auprès des CE, Flacher David, maître de conférence Université Paris 13, Maryse Gadreau, professeure émérite de l’Université de Bourgogne, Jacques Généreux, professeur IEP de Paris,Patrick Gianfaldoni, maitre de conférences à l’Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse, Alain Guéry, Histoire économique, CNRS, Bernard GuibertOzgur Gun, maitre de conférences à l’Université de Reims, économiste-statisticien, Jean-Marie Harribey, maître de conférence Université Bordeaux 4,Isabelle Hirtzlin, économiste de la santé, Michel Husson, économiste, Sabina Issehane, Université Paris 13, Andrée Kartchevsky, économiste et professeure des Universités, Pierre Khalfa, syndicaliste, membre du Conseil économique, social et environnemental, Robert Kissous, statisticien-économiste, consultant auprès des Comités d’Entreprise, Dany Lang, maître de conférence Université Paris 13, Philippe Légé, maître de conférence Université de Picardie, Pierre Le Masne, maitre de Conférences à l’Université de Poitiers, Jean Magniadas, membre honoraire du Conseil économique social, Catherine Mills, maître de conférence Université Paris 1, Matthieu Montalban, maître de conférence Université Bordeaux 4, Alain Morin, directeur de la revue Economie et Politique, François Morin, professeur Université Toulouse 1, Jean-François Ponsot, maître de conférence Université Grenoble 2, Frédéric Rauch, rédacteur en chef de la Revue Économie et Politique Jacques Rigaudiat, ancien conseiller social des Premiers ministres Rocard et Jospin, Robert Salais, chercheur ENS Cachan, Richard Sobel, maître de conférence Université Lille 1, Bruno Tinel, maître de conférence Université Paris 1, Stéphanie Treillet, économiste, Franck Van De Velde, maître de conférence Université Lille 1, Sébastien Villemot, Ecole d’Economie de Paris.

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